Le déclin du présidentialisme et la crise institutionnelle

Franck-Abed


Depuis plusieurs années, un constat s’impose à tous, quelles que soient les sensibilités politiques et les horizons intellectuels : la fonction présidentielle se délite, s’use et se vide de sa crédibilité. Loin d’être perçue comme le sommet stable et incontesté de l’autorité politique, elle apparaît désormais affaiblie, en perte de vitesse et incapable d’incarner durablement l’unité nationale.

Ce phénomène s’est considérablement accentué depuis 2017 : les deux mandats d’Emmanuel Macron ont révélé, avec une brutalité saisissante, les fragilités d’une magistrature suprême désormais en tension permanente avec le pays réel, surmédiatisée, sollicitée jusqu’à la corde et plus grave encore, de moins en moins respectée.

Chaque prise de parole du Président, du Premier ministre ou des membres du gouvernement accentue l’effritement du pouvoir et dévoile une vulnérabilité impossible à dissimuler. Le simple exercice de l’autorité révèle désormais les limites de cette République, fondée sur des mythes politiques épuisés, la dramatisation permanente, la communication compulsive et une classe dirigeante plus que jamais déconnectée des vrais enjeux politiques et sociaux.

En définitive, cette usure et cette décrédibilisation ne s’enracinent pas seulement dans les personnalités placées au sommet de l’État ni dans les scandales qui ont marqué la Ve République : elles manifestent l’épuisement d’un système devenu incapable d’assumer ses prérogatives. Elles révèlent également une véritable déchirure entre le peuple et les dites élites. L’incapacité croissante du système républicain à affronter les défis de notre époque tient à une caste politique incompétente, plus préoccupée de ses intérêts particuliers que du Bien commun. Le présidentialisme est devenu la scène où se rejouent inlassablement les mêmes tensions, à savoir l’opposition stérile entre un État faussement fort et un désenchantement collectif, la dilution de l’autorité réelle et la quête continuelle d’une légitimité… introuvable.

Or, pour qui scrute cette involution politique à la lumière de la doctrine sociale catholique et de la pensée royaliste, le constat est sans appel : ce déclin révèle l’échec du projet républicain, fondé sur des bases instables et trompeuses. Dans notre tradition politique, la légitimité du pouvoir ne découle ni de la richesse, ni de la force des médias, ni du vote populaire, toujours fluctuant et subissant la pression médiatique constante. Le monarque, lui, se tient au‑dessus de la mêlée : son autorité puise sa légitimité dans l’ordre institutionnel, le respect des corps intermédiaires et la continuité historique, assurant que l’Etat soit au service du Bien Commun et non des intérêts fugaces d’une opinion changeante.

L’idéalisme démocratique contemporain, avec son culte du chef et de la popularité immédiate, oublie que le pouvoir politique existe pour servir le Bien, le Beau et le Vrai. Il ne peut s’exercer sereinement que dans un cadre de principes immuables et dans le respect des traditions. Lorsqu’il se concentre entre les mains d’un dirigeant isolé, dépendant de l’humeur des électeurs, prisonnier des sondages et vulnérable aux pressions de toutes sortes, le pouvoir s’affaiblit, se dérègle et s’expose aux excès comme aux déconvenues. La personnalisation extrême du pouvoir rompt le lien avec les Français, fragilise les institutions et menace la cohésion nationale, triste réalité que nul ne peut aujourd’hui ignorer.

Le spectacle politique des Présidents illustre une crise systémique. La tentation d’un pouvoir parfois écrasant, centré sur l’homme et détaché de Dieu, se heurte au rejet populaire croissant. La défiance ne cesse de croître. Le système présidentiel révèle son inaptitude à garantir la stabilité et l’harmonie nécessaires à la conduite d’un État véritablement souverain. En effet, nous traversons des catastrophes répétées : dettes, chômage, insécurité, violences du quotidien, effondrement des services publics, terrorisme, etc. Il paraît fort probable que la situation s’aggrave, tant l’État républicain accumule échec sur insuccès. Ceux qui en tiennent les rênes semblent, hélas, refuser de remettre en cause leurs actions…


De ce point de vue, la vraie réflexion ne se limite ni à une énième réforme constitutionnelle, ni au simple choix d’un nouveau Président en 2027 ou en 2032. Elle touche à l’essence même de nos institutions et à la légitimité qui les fonde. Tout appel sérieux à leur renouvellement devra s’accompagner d’un travail de refondation sur la remise du pouvoir dans son juste ordre, respectueux des équilibres naturels et guidé par une vision transcendante de l’ordre politique, faute de quoi toute réforme perpétuera l’échec.


Face au déclin du présidentialisme, il ne s’agit pas seulement de changer un homme ou de voter un budget, mais de restaurer un système politique ayant déjà fait ses preuves. Le modèle monarchiste, loin d’être un simple retour au passé, incarne un pouvoir ordonné, soumis à la loi naturelle, placé sous le regard de Dieu et au service du peuple. Il offre des repères stables, une continuité historique et une légitimité qui dépasse les aléas électoraux et les passions éphémères. Autant de qualités qui se révèlent cruellement absentes de nos jours. Que chacun prenne ses responsabilités…




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