Luis Enrique

FRANCK ABED SPORT

Pour rédiger cet article, j’ai choisi de laisser passer le temps nécessaire, convaincu que seul le recul, mûri par la réflexion, permet d’atteindre une compréhension à la fois approfondie et juste d’un événement ou d’une situation.

D’emblée, je précise que si j’avais fait partie de l’état-major du PSG, je n’aurais pas choisi Luis Enrique. Pourtant, une fois nommé, dès les premiers jours, j’ai été convaincu par sa personne et son approche. Lors de ses conférences de presse inaugurales, j’ai immédiatement compris que le PSG avait enfin trouvé un véritable chef. Son regard, ses gestes, son maintien, le choix précis de ses mots, révélaient une volonté inébranlable, une confiance profonde en lui-même et dans sa méthode. En analysant son parcours au PSG, nous pouvons même établir des analogies intéressantes avec la politique.

Au commencement, Luis Enrique a décidé d’écarter de son effectif les joueurs qu’il considérait ingérables ou indésirables. En politique, il est également nécessaire de se séparer des éléments nuisibles ou non alignés, ce qui rappelle inévitablement la parabole du Christ sur le bon grain et l’ivraie…

Un entraîneur peut s’adapter aux qualités et aux caractéristiques de ses joueurs ou exiger que ces derniers adoptent à sa vision. Je privilégie nettement la seconde approche, celle prônée par Luis Enrique, qui repose intégralement sur le collectif. Un entraîneur ne doit pas bâtir sa stratégie en fonction des seules qualités individuelles de ses joueurs, même si ceux-ci figurent parmi les meilleurs au monde.Effectivement, ils doivent s’ajuster au système établi par le chef d’orchestre et non le contraire.

En politique, je privilégie toujours la primauté du système sur les hommes. Je préfère un homme politique médiocre évoluant au sein d’un excellent système plutôt qu’un brillant individu dans un cadre défaillant. Cette conviction illustre parfaitement ce que je promeus : les Principes avant les Princes, l’Héritage avant les Héritiers. Depuis toujours, je reconnais pleinement l’importance et la force inhérentes aux institutions dignes de ce nom.

Un des atouts majeurs de Luis Enrique réside dans sa capacité à imposer une idée claire et rigoureuse de son football. Sa méthode repose avant tout sur une maîtrise totale du jeu, le contrôle du ballon, un rythme dynamique soutenu, ainsi qu’une pression maximale sur l’adversaire dès qu’il entre en phase de possession. Il ne s’agit pas simplement de laisser les talents s’exprimer au gré de leur inspiration individuelle, mais bien de faire fonctionner l’équipe comme un organisme cohérent, où chaque joueur a un rôle précis et interdépendant.

Ce contrôle strict ne signifie pas rigidité stérile, mais discipline collective au service de la fluidité tactique. L’objectif vise à créer un équilibre subtil entre organisation défensive et créativité offensive, dans lequel le collectif prime toujours sur les individualités. Chaque action, chaque déplacement est pensé, coordonné, afin d’optimiser la performance globale. L’objectif ultime consiste à mettre en valeur l’ensemble de l’équipe, plutôt qu’à privilégier un joueur en particulier.

Au-delà du système de jeu, Luis Enrique incarne l’idée qu’un seul capitaine dirige le bateau. Cette métaphore éclaire l’essence du pouvoir : en politique comme dans le sport, la réussite passe par une direction forte, capable de guider le groupe, de trancher dans le vif, d’imposer des décisions et de les assumer pleinement. De fait, le collectif ne doute pas de la trajectoire tracée, car l’entraîneur reste visible, présent, et surtout, cohérent. Le respect rigoureux des consignes représente, à mes yeux, une exigence fondamentale et non négociable.

Cette cohérence s’exprime également dans la capacité de Luis Enrique à maintenir sa ligne, envers et contre tout. Face aux récriminations, parfois virulentes, et aux pressions extérieures - qu’elles soient médiatiques ou populaires - il n’a jamais dévié de son cap. Sa gestion se distingue par une détermination sans faille, ancrée dans la conviction que la réussite dépend d’une vision claire et d’une mise en œuvre méthodique, surtout face à l’adversité. 

En effet, alors que l’équipe se retrouvait au bord de l’élimination lors de la phase de poule en Coupes d’Europe il n’a jamais faibli. Il a toujours assumé pleinement la responsabilité des critiques, protégeant inlassablement sa troupe des pressions extérieures. Il n’a jamais dévié de sa ligne directrice, faisant preuve d’une ténacité exemplaire pour maintenir la cohésion et la confiance au sein de l’équipe, même dans les moments les plus périlleux. Il a su parfaitement incarner la devise de la ville de Paris : « Battu par les flots, mais ne sombre pas ».

Un exemple marquant de cette rigueur disciplinaire fut la décision audacieuse, mais vivement critiquée par certains à l’époque, de ne pas convoquer un joueur clé avant un match européen très important. Ce dernier avait enfreint les règles strictes établies par Luis Enrique, notamment par un retard à l’entraînement et un manque de jeu collectif lors des précédentes rencontres. Nombreux furent ceux qui condamnèrent cette mesure, oubliant que la discipline et le respect sont les piliers indispensables au bon fonctionnement de toute association ou entreprise.

Le résultat immédiat fut une défaite, mais les joueurs comprirent rapidement qui détenait véritablement l’autorité : avec cet entraîneur espagnol, les passe-droits n’existeraient pas. À plus long terme, le bilan se montra encore plus révélateur. Ce joueur, pleinement intégré à sa nouvelle fonction, réalisa la meilleure saison de sa carrière, s’adapta parfaitement au système, fut décisif dans de nombreuses rencontres décisives, et postule aujourd’hui pour remporter le Ballon d’Or. Ironie du sort : ceux qui avaient fustigé avec véhémence la décision de le reléguer en tribune se prennent aujourd’hui à rêver de le voir brandir cette prestigieuse récompense individuelle. Le temps long, une fois encore, vient sceller la sagesse des décisions éclairées et châtier les égarements.

Je tiens à rappeler que certains journalistes ont eu l’outrecuidance, non seulement de supposer, mais encore d’affirmer à maintes reprises que Luis Enrique aurait infléchi sa méthode sous l’effet de leurs observations. Que nenni. L’Asturien est demeuré inébranlablement fidèle à ses principes et à ses méthodes. Il a placé en ses joueurs une confiance absolue, à laquelle ils ont répondu par une loyauté sans faille. Dès lors, les plus éminents journalistes, tant français qu’étrangers, ont reconnu la justesse de sa démarche, consacrée par un niveau de jeu exceptionnel et par une moisson remarquable de titres, parmi lesquels figure la Ligue des Champions, trophée que le PSG n’avait jamais remporté depuis sa création en 1970.


Dans un univers gangrené par le populisme sportif, les injonctions à courte vue et l’instabilité chronique des principes comme des méthodes, Luis Enrique apparaît tel un roc inébranlable. Fidèle à ses éléments constitutifs, imperméable aux modes et aux pressions, il a su préserver son groupe, le soustraire aux tempêtes médiatiques et imposer la discipline souveraine qui seule permet de franchir les sommets. En conséquence, il a conduit ses joueurs vers la pleine réalisation d’objectifs ambitieux, qu’il s’était fixés avec une inflexible persévérance. Ces trophées sont désormais gravés au palmarès pour toujours.

Pour conclure cet article, je lui adresse mes plus profondes félicitations et sincères remerciements, en lui souhaitant une saison sportive 2025-2026 riche en défis et en réussites… 

 

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