Entretien d’octobre 2022

Les questions ont été posées par les internautes. 


Les thèmes sont les suivants : 

zététique, présidentielle, complotisme, vision de la politique, actions politiques. 



Que pensez-vous de la zététique (art du doute, posture sceptique) et seriez-vous prêt à débattre avec l’un de leurs représentants ?


Pour dire vrai, je ne connais pas très bien cette mouvance ou cette famille de pensée. Je précise d’emblée que je salue toujours les initiatives qui visent à réfléchir et à se documenter loin des discours étatiques ou de ceux promus par les médias dominants. Maintenant, il convient de ne pas ériger le doute en un art de vivre ou de réfléchir ni même en philosophie. Certains événements sont douteux, d’autres non. Néanmoins, je pense qu’il reste préférable d’adopter une posture prudente qui ne veut pas dire tiède ou indifférente face aux flots d’informations que nous subissons.


Je ne sais pas quel travail les zététiciens accomplissent. J’ajoute que je ne suis pas intéressé par l’idée de débattre pour débattre. Par contre, si nous pouvons discuter et confronter des avis sur un sujet précis pour permettre d’élever le débat, ce sera avec grand plaisir. Je n’ai jamais refusé une disputatio intelligente à condition qu’elle soit respectueuse.


D’une manière générale, je ne fonce jamais tête baissée et je prends le soin d’analyser les sources tout en les confrontant. Il faut savoir digérer les informations en les décortiquant voire en les disséquant. Une donnée mal décryptée peut provoquer de lourdes conséquences intellectuelles, politiques et pratiques. La raison doit nous guider et nous ne devons pas nous laisser emporter par les tempêtes médiatiques. Les médias peuvent être très nocifs avec leurs messages incessants et parfois contradictoires. Il est vital de bien se former intellectuellement pour analyser correctement les événements.  


Ceux qui travaillent honnêtement méritent tout mon respect.


Qu’avez-vous pensé de la dernière campagne présidentielle ?


Cette campagne présidentielle de 2022 est à l’image de notre classe politico-médiatique, en un mot médiocre. Aucun journaliste ou presque ne sut soulever des questions fondamentales. Effectivement, ils posèrent des interrogations banales et évitèrent autant que possible les sujets essentiels. Ils prirent constamment le soin de ne jamais aborder de front les vrais sujets civilisationnels et politiques. Quant aux débats et aux entretiens entre les journalistes et les candidats, dans l’ensemble, ils ne se montrèrent guère intéressants. 


A ce sujet, je me rappelle d’un débat annoncé sur une grande chaîne de télévision privée. En définitive, tous les candidats officiels et déclarés ne se trouvèrent pas sur le plateau. Certains, jugés petits candidats, ne reçurent pas d’invitation. Cette lacune provoqua de légers remous mais rien de bien sérieux. Sincèrement, j’ai trouvé le procédé quelque peu malhonnête mais en réalité très républicain et démocrate, comprendre hypocrite. 


Finalement, ce ne fut pas une confrontation entre les candidats, mais une suite d’oraux  à la queue-leu-leu face aux journalistes. Ce fut un exercice littéralement fastidieux que j’ai pris la peine de suivre dans son intégralité. Chaque oral dura - de mémoire - plus ou moins 20 minutes. A la fin de cette émission, une conclusion s’imposa logiquement : nous, Français, n’avions rien appris d’important après cette caricature d’émission politique. Comme tout acteur et observateur politique honnête, je me disais en mon for intérieur : « Toute cette mascarade pour si peu ». Ainsi, le débat démocratique tant vanté, promu et survendu par les instances suprêmes de la République ne vit jamais le jour tout au long de cette  pénible campagne présidentielle.


Pour évoquer rapidement les différents candidats, j’écris sans réserve qu’aucun ne se hissa vraiment à la hauteur de l’événement. Le président sortant se montra hautain et méprisant. Il ne prit point la peine de descendre dans l’arène pour affronter ses concurrents. Dès le début des hostilités, il estima que sa présence au deuxième tour lui était aisément acquise. Le contraire eut été étonnant avec une telle (fausse) opposition et une propagande médiatique totalement en sa faveur. De plus, son attitude face à Marine Le Pen lors de leur confrontation entre les deux tours révéla encore son arrogance, son manque de tenue et de respect.


Je ne réaliserai pas une revue de chaque programme mais je reste intimement convaincu qu’entre la démagogie des uns et la nullité des autres, cette campagne présidentielle fut bien morne. Ils sont, en définitive, restés dans des guerres d’ego et de vanité. Ils ont préféré défendre leurs petits appareils politiques que d’affronter droit dans les yeux les vrais problèmes et le regard des Français. L’offensive anti-France fut comme à l’accoutumée très forte durant cette énième présidentielle.


Pour finir, le président fut élu par une minorité d’électeurs, ce qui en dit long, à la fois, sur sa prétendue légitimité démocratique et sur le bon fonctionnement des institutions républicaines. Le peuple de France, à raison, ne se déplaça pas en masse pour voter. Je trouve cela rassurant. 


Le mot complotiste revient très souvent dans les grands médias. Ce terme est également très utilisé dans les débats politiques. Qu’en pensez-vous ?


Le terme complotiste est utilisé par les tenants des discours officiels pour caricaturer des opposants politiques qui peuvent parfois être sérieux. Crier dans un débat : « vous êtes complotiste » revient à vous reléguer dans une case honnie. C’est le nouveau point Godwin de notre époque, parce qu’il me semble que les accusations de « nazi » ou de « facho » rencontrent moins de succès plus les années filent. Ceci étant rappelé, dire à un contradicteur qu’il est ou serait complotiste revient à ne pas vouloir répondre sur le fond aux arguments développés. C’est une stratégie rhétorique médiocre mais certains de nos compatriotes, suite entre autres aux épisodes Covid, sont tellement imbriqués mentalement dans la matrice qu’ils tombent dans le panneau.


Ma position est très simple et comme toujours je renvoie les extrémistes des deux camps dos à dos. Les complots existent, mais tous les grands événements politiques ou sociaux ne sont pas des complots. Nier cette évidence revient à être menteur, de mauvaise foi ou à faire preuve de pusillanimité. Ou alors, il s’agit d’un manque de formation historique et politique qui peut être rapidement comblé après la lecture de bons ouvrages.


Concrètement, prenons la période historique fétiche de nos gouvernants, à savoir la Révolution en France. A cette époque tous les camps complotent : les royalistes pour sauver le Roi et la famille de France, les révolutionnaires pour conquérir et garder le pouvoir, pour calomnier et combattre leurs adversaires politiques, etc. Robespierre tomba de son piédestal parce qu’il fut victime d’un complot ourdi par une faction révolutionnaire rivale. 


Après leur période favorite, prenons maintenant le grand homme, selon eux, de la Vème République. De Gaulle prit le pouvoir grâce un coup d’Etat militaire lui-même initié par des généraux… complotistes. Cette Vème République est quand même née grâce ou à cause d’un putsch militaire. Nos adversaires l’oublient, pas nous. Donc question complot et illégalité de l’action politique, ils peuvent difficilement nous faire la leçon. Pourtant, ils ne s’en privent guère.


Prenons un dernier exemple, de nos jours, dans une entreprise quelconque, au sein d’un conseil d’administration de dix personnes, quand trois d’entre elles se réunissent pour mettre en place une stratégie contre les sept autres, à l’abri du secret et du regard d’autrui, elles complotent. Pour être le plus précis possible, les complots existent depuis la nuit des temps. Pour aller plus loin que le 10 Thermidor ou le 13 mai 1958, je rappelle brièvement que Jules César mourut assassiné lors d’une cabale fomentée par des membres de l’élite romaine. Demain, il y aura encore des complots et j’en suis intimement convaincu car les organes de pouvoir aiguisent malheureusement les bas instincts humains.


Toutefois, il existe une profonde différence entre reconnaître l’existence des complots et penser que tous les grands événements émanent de comploteurs. Ce discours, en fin de compte, renforce le mythe incapacitant : cela signifie qu’il accrédite l’idée chez de nombreux Français de ne pas militer pour leurs idées car tout serait sous contrôle. De fait, beaucoup de complotistes restent dans l’attentisme et la passivité. Ils se contentent de consommer des vidéos complotistes dénonçant des complots réels mais souvent fantasmés. 


Par conséquent, quel serait l’intérêt d’agir car tout serait maîtrisé à cause des complots et des manigances des grands de ce monde ? Cette position politique, loin de renforcer le militantisme dont nous avons grandement besoin, sert en réalité efficacement les tenants du système. Subséquemment, elle accrédite l’idée que l’adversaire incarne la toute-puissance. Ce qui est naturellement faux car seul Dieu est Tout-Puissant. En revanche, une certitude demeure : nos ennemis détiennent de nombreux leviers d’action.  Il convient donc de ne pas tomber dans l’excès inverse en pensant que la ploutocratie ne contrôle rien ou si peu.


Toutefois, il me semble important de préciser que les propos complotistes excessifs nuisent au discours critique argumenté et circonstancié envers la doxa. Nos adversaires ont beau jeu de rejeter toutes nos analyses en nous amalgamant à des idées et des personnes avec lesquelles nous sommes en réalité très éloignées. A nous de ne jamais succomber à l’émotionnel, à l’énervement et au sentimentalisme, pour argumenter sereinement. 


De même, lorsqu’un contradicteur ne prend pas la peine de répondre sur le fond aux arguments avancés en vous accusant de complotiste, il convient de ne pas perdre trop de temps pour répliquer. Gardons notre énergie pour les personnes qui désirent vraiment apprendre au-delà du discours médiatique ambiant, souvent mensonger ou en tous les cas très partiel. Quant à ceux qui voient des complots partout, soyez vigilants à leur égard parce que si vous n’adhérez pas à leur vision caricaturale du monde et de la politique, vous serez accusés tôt tard d’être un agent du système…


Le complotisme nie le réel en proposant une explication unique et simpliste d’un phénomène recouvrant en réalité de multiples domaines. La réalité est souvent complexe, et je reste toujours méfiant devant tous types de simplifications abusives. L’analyse doit toujours être factuelle, objective et fiable. Elle ne doit nullement reposer sur des impressions personnelles et des arguments creux ou vides de sens. 


Alors oui, les complots existent mais un reptilien ne se cache nullement derrière le masque humain de Charles III d’Angleterre…

 

Comprenez-vous le dégoût que la politique inspire à de nombreux Français ?


Non, je ne le comprends pas. La politique reste une des applications concrètes de la charité. Nous devons tous la pratiquer au quotidien même si l’exercice s’avère compliqué. Par conséquent, il est impossible d’être dégoûté de la charité. Qu’en revanche les Français expriment un profond rejet ou de la déception à l’endroit des politiques, plus préoccupés de garnir leurs comptes bancaires et de profiter des avantages outranciers de leurs positions, je peux aisément le comprendre à une réserve près. 


En effet, parmi tous les dégoûtés des politiques en 2022, combien ont voté pour les derniers présidents en exercice sans apprendre de leurs erreurs et sans jamais se remettre en cause ? Je cite Orwell pour appuyer mon propos : « Un peuple qui élit des corrompus, des renégats, des imposteurs, des voleurs et des traîtres n'est pas victime ! Il est complice. » Tout un chacun peut se faire avoir et rouler dans la farine une ou deux fois. Cependant la comédie républicaine et démocratique dure depuis plusieurs décennies. Les Français se plaignent beaucoup mais ils mettent ou remettent au pouvoir des politiques issus de formations politiques qui détruisent la France, ses richesses, sa souveraineté et son histoire. C’est d’un illogisme sans nom.


A un moment donné, les Français doivent aussi mener des actions décisives et ne pas rester passifs alors que leur pays sombre. C’est bien gentil de se plaindre une fois les élections passées, mais la question reste entière : quand se décideront-ils à prendre leurs responsabilités pour mettre dans les instances du pouvoir des hommes soucieux de la France et du Bien Commun ? La déception, la frustration et la colère légitime contre cette caste politico-médiatique ne doivent pas être des freins à la réflexion et à l’action politiques. L’avenir n’est pas écrit, après-demain dépend des décisions et des actes que nous posons dès aujourd’hui. 


Il me semble aisé de regretter ou de se plaindre tout en n’agissant jamais ou si peu pour son pays. Le fait que les déçus ne militent pas pour leurs idées constitue une aubaine pour le pouvoir en place. Ce dernier préfère des hésitants ou des inactifs plutôt que des gens motivés et volontaires pour les chasser de l’Elysée et de Matignon. 


Ma grand-mère paternelle me disait : « Si les dégoûtés partent de la politique, il ne restera alors que les dégoûtants ». Aimez la France, agissez pour Elle, investissez-vous en politique pour balayer nos adversaires… que certains trouvent dégoûtants. 


Rehaussons la politique en agissant dans la Cité au nom du Bien Commun pour que les Français retrouvent cette Espérance qui semble leur faire tant défaut. L’avenir dépend de nos actions quotidiennes. J’en suis certain, alors en avant !




Propos recueillis le 27 octobre 2022





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